L’hiver approche à grands pas, même si dans certaines régions nous en avons déjà eu un avant goût avec des gelées marquées au petit matin et un thermomètre qui n’a pas dépassé les 5°C par endroit au meilleur de la journée ces dernières semaines. Chacun réagit différemment au contact de cet air froid : certains s’adaptent plutôt bien, quand d’autres enfilent plusieurs pulls et ne supportent pas l’idée de se retrouver dans un environnement bien frisquet. J’ai récemment reçu un mail d’une prénommée Cathy qui me disait qu’elle se sentait « hypersensible » au froid et qu’elle n’arrivait pas à s’habituer à ces ambiances glaciales. Elle s’est décrite comme très frileuse et m’a demandé des conseils à ce sujet. Je lui ai raconté comment j’avais réussi à habituer naturellement mon corps au froid ( car oui on peut entraîner sa résistance au froid), des astuces que je vous donnerai d’ailleurs à tous bientôt (je peaufine un article sur ce sujet qui sera sur le blog bientôt).

Mais comme le sujet est particulièrement intéressant, j’ai posé des questions à ce sujet à Dr Flo que vous connaissez peut-être : il est médecin généraliste dans le sud de la France et a récemment écrit un livre « Dr Flo : médecin 2.0 » où il raconte son parcours et donne de supers conseils sur Instagram. Je vous retranscrit ici nos échanges ; et si vous avez d’autres questions sur le sujet, n’hésitez pas à les poser en commentaires, nous nous ferons un plaisir d’y répondre

« De nombreux facteurs influencent notre sensibilité au froid »

V – Y a t-ils des profils de personnes plus susceptibles de souffrir d’hypersensibilité au froid ?

Dr Flo : Il n’y a pas à proprement parler de « profils » de personnes hypersensibles au froid. De nombreux facteurs influencent notre sensibilité au froid et les choses peuvent varier d’une personne à l’autre et même pour une même personne au cours de sa vie. Parmi ces facteurs on peut faire une liste non exhaustive : les personnes « plutôt maigres » voire dénutries sont plus sensibles au froid, les personnes qui souffrent de pathologies de la thyroïde peuvent être plus sensibles au froid (en cas d’hypothyroïdie), la déshydratation, la fatigue peuvent être d’autres facteurs transitoires de susceptibilité au froid.

V – Peut-on devenir hypersensible au froid  (avec l’âge notamment …) ?

Dr Flo : L’hypersensibilité au froid n’est pas en soi une pathologie. il est tout à fait possible de voir sa sensibilité au froid se modifier, notamment sous l’influence des facteurs que j’ai cités précédemment, et aussi sous l’influence de variations physiologiques normales, comme le vieillissement que tu décris par exemple, les variations de poids peuvent en faire partie également.

Pour mieux comprendre

Lorsque l’on prend de l’âge, le métabolisme ralentit et en conséquence, une personne âgée aura une température du corps sensiblement plus basse, souvent comprise entre 36 et 36,6 degrés. Bien souvent, avec l’âge, la masse musculaire diminue et de la couche de graisse qui se trouve sous la peau et qui constitue en temps normal un isolant thermique naturel pour lutter contre le froid est aussi plus mince. Enfin, vous le savez sans doute, mais quand il fait très froid, l’afflue de sang qui irrigue les mains et les pieds diminue, pour se concentrer sur les organes vitaux comme le coeur ou le cerveau, ce qui va limiter la déperdition de chaleur. Chez les personnes âgées, cette vasoconstriction est moins efficace et la chaleur se disperse plus vite. Pour toutes ces raisons physiologiques les personnes âgées ont tendance à moins ressentir le froid que la moyenne et leur organisme s’adapte beaucoup plus mal aux changements de température importants.

« la sensation de froid est un message envoyé par le cerveau au reste du corps »

V – Y a t-il des mauvais gestes qui nous fragilisent ? Je pense par exemple au fait d’abuser du chauffage.

Dr Flo : Il n’y a en ce sens pas de « mauvais gestes » à éviter qui fragilisent, en dehors du fait d’éviter la déshydratation, la fatigue excessive, de corriger une hypothyroïdie etc… Pour reprendre ton exemple, surutiliser le chauffage par exemple, ne risque pas de rendre plus hypersensible au froid. La réflexion est plutôt inverse à savoir c’est plus l’hypersensibilité au froid qui va rendre l’utilisation plus poussée du chauffage. En gros, hors cas de maladie particulière, la sensation de froid est un message envoyé par le cerveau au reste du corps. Le froid fragilise l’organisme, qui a besoin d’une température constante et régulée pour fonctionner de manière optimale. Si mon organisme est très sensible aux diminutions de température, il faut savoir adapter son environnement pour ne pas en souffrir.

V – Ces personnes sont-elles plus faibles et donc susceptibles de tomber davantage malade ?

Dr Flo : Sur la susceptibilité aux maladies, j’imagine que tu évoques surtout les infections hivernales type rhume, sinusite, bronchite etc… Alors déjà je voudrais commencer par dire une chose qui est importante pour moi : on ne peut pas « attraper froid » : cela ne veut rien dire. Le froid n’est pas une maladie. Ce qu’on attrape quand on tombe malade ce sont des virus, ou des bactéries, qui sont généralement transmises par nos voisins (ou proches, ou collègues de boulot etc…). Le froid ne rend pas malade, en tout cas pas seul. Le froid fragilise l’organisme, qui devient plus sujet à contracter une infection due à un microbe, s’il en croise un… Généralement en hiver, sous l’effet du manque de soleil les microbes survivent plus longtemps dans l’air, et comme en période de froid on a tendance à se grouper à l’intérieur et à fermer les fenêtres, on est globalement plus exposés aux virus et bactéries en tout genre. D’où le fait d’être plus malade. Maintenant ceci étant dit, il est vrai que si on est hypersensible au froid, ET QU’ON NE S’EN PROTÈGE PAS, on risque de tomber plus malade, parce que ce froid va nous fragiliser.

Pour mieux comprendre

Dans le même sens, le froid ne tue pas les microbes ! En voilà une belle idée reçue, car si les microbes ne résistaient pas aux températures basses (en dessous de 0°C), on n’enregistrerait pas des pics de gastros, de rhumes et de grippes en hiver… Bien au contraire, les virus voyagent dans un petit cocon qui s’épaissit avec le froid et la baisse de la luminosité est un environnement qui leur conviennent bien aussi : le rayonnement UV est moins intense. En revanche, il est vrai que chaque microbe a une fourchette de températures préférentielles pour se multiplier et donc se propager.  Le froid glacial peut donc en effet ralentir leur développement mais en aucun cas les stopper.  

V – Quand faut-il consulter ?

Dr Flo –  En tant que médecin généraliste, je conseille à tous mes patients de consulter quand ils en ressentent le besoin. Je préfère toujours voir une personne qui était inquiète de son état de santé, et qui finalement n’a rien, que de ne pas voir une personne qui pense bien aller, ou ne pas devoir déranger, ou ne pas vouloir prendre le temps de venir et qui finalement à quelque chose de grave. Globalement il faut s’écouter, quand on sent un truc pas net, on consulte. Pour donner des repères (qui ne sont que des repères et doivent être pris avec recul et être adaptés à chaque situation), on conseille généralement, en cas de signe d’infection banale (petite fièvre, toux, nez qui coule etc…) d’attendre environ 48h pour voir si cela passe seul et de consulter si ce n’est pas le cas (encore une fois on peut consulter avant si les choses semblent être plus complexes que prévue). Après si une personne semble avoir régulièrement « trop » froid par rapport à son entourage par exemple, ou si elle semble avoir « plus froid que d’habitude » cela me paraît bien d’aller consulter pour en parler et recherche notamment des problèmes de thyroïdes qui peuvent se manifester à cette occasion.

Pour mieux comprendre

Vous avez sans doute dû le ressentir, dès que l’on se sent fatigué, on a aussi plus froid. La fatigue dérègle en effet partiellement notre système nerveux et tous les mécanismes de notre corps qui permettent de réguler notre température corporelle. Lorsqu’il manque d’énergie, notre corps assure de fait moins bien ses fonctions principales (effort musculaire, digestion, etc.). Or, la plupart de ces réactions sont à l’origine d’un dégagement de chaleur pour l’organisme.

V – Quels sont vos conseils pour y remédier ?

Dr Flo – Le principal conseil que je puisse donner est d’écouter les signaux de son corps et son ressenti et d’y répondre. Globalement, si j’ai froid, je fais ce qu’il faut pour me couvrir ou me réchauffer. Hors maladie, un ressenti est un message envoyé par le corps et/ou le cerveau pour entraîner une réaction et obtenir un meilleur confort. Si le ressenti semble anormal, bizarre, disproportionné, alors il faut aller consulter pour voir si une pathologie ne peut pas être en cause.

Pour mieux comprendre

Pour mieux lutter contre le froid, il faut aussi adapter son alimentation : la moitié de nos dépenses caloriques quotidiennes est consacrée à maintenir une température corporelle stable (c’est ce qu’on appelle la thermogenèse). Or les personnes qui s’imposent des diètes drastiques et restrictives (jeûnes, régimes hypocaloriques, etc.) ne consomment pas un nombre suffisant de calories pour assurer une thermogenèse efficace. Résultat : l’organisme ne réussit pas à maintenir sa température corporelle à 37°C, et on a froid ! Et plus on a froid, plus notre corps va brûler des calories pour essayer de faire remonter notre température. En hiver, il ne faut pas manger plus mais davantage d’aliments riches en protéines et des féculents qui sont sources d’énergie. Ils nécessitent plus de temps pour être digérées que les glucides et les lipides, ce qui demande au corps plus d’énergie pour les absorber et crée ainsi plus de chaleur. Aussi, les protéines permettent de construire et maintenir les fibres musculaires, or les muscles produisent de la chaleur.

A lire « Docteur Flo, docteur 2.0 »

Dans son livre, Docteur Flo revient sur son parcours de médecin : la révélation de sa vocation, ses années d’apprentissage à la fac, ses premiers remplacements, sa relation avec ses patients, son rôle de papa et la place d’Instagram dans sa vie de médecin généraliste. Une biographie sympa qui se lit très facilement ( je l’ai terminé en deux jours) où l’on découvre un médecin touchant et drôle qui nous permet de mieux comprendre l’envers du décor de ce métier parfois difficile mais passionnant. On peut même y piocher quelques conseils intéressants : j’ai, par exemple, appris que de boire froid était plus efficace pour soigner une angine que de boire chaud. Je vous laisse vous plonger dans le livre pour découvrir pourquoi ! 😉